Un humoriste biterrois à Montmartre

Ce texte est le 550ème publié sur mon site (358 en roumain, 174 en français et 18 en italien ou anglais). Ces titres ont totalisé env. 24 000 « single visitors » par an et entre 160 000 et 200 000 « visits » chaque année depuis 2020. J’aimerais remercier tous les lecteurs qui suivent, semaine après semaine, tous ces sujets qui me passionnent. Malheureusement, je ne connais personnellement qu’une infime partie d’entre eux ! Je profite de cette occasion pour leur manifester ma reconnaissance pour leur fidélité, malgré ma décision de ne pas faire appel à aucun moyen de promotion de masse (réseaux sociaux, annonces, publicités pour le site…). Et je m’engage à continuer, de la même façon, le plus longtemps possible et tant qu’ils continueront à lire mes écrits.
 

Ce texte a été publié dans la revue « Planet Paris Montmartre », éditée à Paris au 4e trimestre 2022, qui poursuit sa parution sous différents titres depuis 1987.
 

Je n’aurais probablement jamais entendu parler de Gabriel de Lautrec, « le Prince de l’humour », si je n’étais, depuis une quinzaine d’années, membre de la Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers.

La

« Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers », connue aussi sous l’acronyme SASL, est une « société savante créée le 28 octobre 1834. Elle succède à l’Académie de Béziers, ancienne société qui en 1766, a été érigée en Académie royale des sciences et belles-lettres puis a disparu en 1790.

La société a pour siège l’hôtel de Bergé. Là sont réunies la bibliothèque et les collections de la société. La bibliothèque est ouverte aux chercheurs. Les conférences sont données dans les salons. »

Tout cela était parfaitement vrai jusqu’à l’apparition de la pandémie du COVID 19. Qui a démarré en même temps que les travaux de restauration de l’Hôtel de Bergé.

Les réunions ayant été interrompues par ces deux événements, la direction de SASL a décidé de lancer un bulletin d’information hebdomadaire, intitulé « Le coin des curieux », qui se propose de ramener dans la mémoire des membres les faits, lieux et personnalités remarquables de l’histoire de la ville de Béziers. 

C’est ainsi que j’ai découvert, le 21 décembre 2021, l’existence de Gabriel de Lautrec, l’humoriste biterrois tout aussi oublié à Béziers qu’à Paris, malgré son activité littéraire en tant que chroniqueurtraducteur et poète.

Voici la présentation de celui qui fut « un franc rigolo » :

Gabriel de Lautrec fils de Jean Lautrec banquier, propriétaire viticole et de Delphine Hondrat, naît à Béziers le 20 février 1867. 

Cousin du célèbre peintre Henri de Toulouse-Lautrec avec qui il est souvent confondu, il fut élève de la faculté de lettres de Montpellier, puis professeur au collège de Sète, avant de monter à Paris au début des années 1890.

Répétiteur au Lycée Janson de Sailly, il fréquente les brasseries littéraires du Quartier latin et devient ami de Verlaine et d’Alphonse Allais. Il tient un salon rue Desbordes-Valmore à Passy et fonde en 1930, avec Courteline et Curnonsky, l’Académie de l’humour français dont il devient président. 

Traducteur de Marc Twain, il publie plusieurs ouvrages et collabore dès 1896 à de nombreuses revues humoristiques, dont Le Rire (1894) avec Poulbot et La Petite Semaine avec Roland Dorgelès. 

L’humour de Gabriel de Lautrec est empreint de loufoquerie, de non-sens et d’absurde et frôle à la fois les limites de la poésie ou celles du fantastique. Conteur, il fait partie de la dernière génération des humoristes du « Chat noir », avant les chansonniers de Montmartre et les soirées du « Lapin agile », qu’il fréquenta avec Mac Orlan, Max Jacob, Paul-Jean Toulet et Francis Carco.

Son œuvre fait le lien entre l’humour fin de siècle et celui de l’après-guerre avec Pierre Dac (François Caradec, Entre miens, d’Alfonse Allais à Boris Vian).

Il meurt à Paris le 25 juillet 1938.  

A juste titre, Gabriel de Lautrec est considéré comme « le disciple oublié d’Alphonse Allais ».

C’était un personnage « remarquable et remarqué » :

« Il apparaît à Paris en 1889, svelte et élégant, portant monocle, il est vicomte, et fume le cigare. Répétiteur dans un lycée parisien, il fréquente les brasseries littéraires du Quartier latin et fait la rencontre d’Alphonse Allais au Chat noir, le cabaret montmartrois. » 

Pour se faire une idée du style de Gabriel de Lautrec, voici un court texte de Gaston Derys, publié dans « L’art d’être gourmand » à Paris, chez Albin Michel en 1929.

Il s’agit d’une recette signée Gabriel de Lautrec, extraite d’un livre qui donne 290 recettes de gens de lettres, artistes, hommes politiques, etc.

Omelette aux œufs durs

« L’omelette aux œufs durs se prépare ainsi : vous faites durcir des œufs, à raison d’un par personne. Puis vous les coupez en quatre, dans le sens de la longueur, pour ménager le jus.

Cela fait, vous confectionnez une omelette ordinaire, avec les œufs bien battus. Quand elle commence à cuire, vous y précipitez vos quartiers d’œufs durs, en les espaçant pour qu’ils ne se rejoignent pas.

Vous pliez l’omelette sur eux, pour qu’on ne les voie pas, et que les convives ne se doutent de rien. Ce plat, quand il est réussi, suscite chez l’estomac une stupeur agréable qui facilite singulièrement la digestion. ».

Pour se souvenir de Gabriel de Lautrec, il ne nous reste plus que d’introduire sa recette dans les menus des restaurants de Montmartre !

 

Adrian Irvin ROZEI

Béziers, août 2022

2 thoughts on “Un humoriste biterrois à Montmartre

  1. A.I.R. écrit:

    A.M.D de Versailles écrit :
    Ton mail destiné à tes lecteurs est très sympathique et, oui ! émouvant aussi.

    C’est un succès bien mérité, Adrian.
    Tu abordes des sujets variés, souvent improbables et intéressants évidemment ;
    tu invites à la découverte et suscite la curiosité d’en savoir plus et d’apprendre.

    Ta curiosité insatiable permet de mettre en évidence des lieux, des figures politiques artistiques … etc… t’attardant sur des détails que ton esprit curieux a remarqués
    et tu établis des liens et des passerelles, grâce à tes connaissances extraordinaires et une mémoire fabuleuse.
    De plus le style accompagne agréablement tous ces récits.
    Pour preuve encore, le portrait de ce monsieur de Lautrec… passé dans l’oubli …et que tu fais revivre, et que tu livres à notre connaissance.
    Sûr que qq part il t’est reconnaissant lui et les autres… aussi. !

    Merci et à bientôt d’autres découvertes à partager.
    M.B.G. de Genève dit :
    Quelle mine de culture cette Société archéologique de Béziers et voilà un bon sujet pour un futur article PPM, à côté de ceux que vous avez déjà en réserve !

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