No sport… but “Belem”. Service après-vente

Le 8 mai 2024, alors que ce texte était en préparation, le quotidien « Le Figaro » publiait un article décrivant avec luxe de détails, la situation actuelle du voilier « Duchesse Anne » dans le port de Dunkerque.

Je ne résiste pas à la tentation de le reproduire « in extenso ». 

Peut-être que ce texte réveillera quelques souvenirs enfouis dans la mémoire de nos contemporains qui se rappelleront l’existence oubliée de documents, photos, journaux personnels, coupures de presse… en rapport avec le passé de ce brillant navire.

Tous ces documents peuvent enrichir les archives du futur musée que sera le trois-mâts dunkerquois. Je souhaite « bonne chance » au directeur du Musée maritime et portuaire, dans l’intérêt de nous tous !


À Dunkerque, le trois-mâts Duchesse Anne sauvé des eaux

Par Claire Bommelaer

Publié le 08/05/2024 à 17:58, mis à jour le 08/05/2024 à 17:58

Ancien navire-école allemand, ce trois-mâts en cours de restauration est un des atouts pour maintenir la mémoire portuaire.

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On ne sait si quelqu’un, en Allemagne ou en France, possède une photo ou un souvenir lié au trois-mâts Duchesse Anne, aujourd’hui amarré à Dunkerque. En ce jour de mai, Dorian Dallongeville, directeur du Musée maritime et portuaire, qui vient de lancer auprès du public un appel aux dons, ne désespère pas. 

« L’année dernière, nous avons reçu le carnet de marin d’un certain Otto Behrend, qui était cadet à bord en 1927, ou le journal de bord de Freidrich Tiechl, également cadet deux ans plus tard », raconte-t-il en tournant délicatement les pages du journal à la couverture en cuir. Les pattes de mouche, rédigées à la mine de plomb, sont en cours de décryptage, et Dorian Dallongeville compte sur ce récit pour pouvoir étoffer la longue légende du trois-mâts. 

Elle est rocambolesque. Construit sous l’empereur Guillaume II pour être un navire-école, celui qui s’appelait à l’origine le Grossherzogin Elisabeth a d’abord permis à des centaines de mousses et de cadets comme Otto et Freidrich, d’apprendre la navigation – à l’intérieur du bateau, on voit encore leurs espaces de vie, bien distincts des quartiers des officiers ou de l’appartement à boiseries du capitaine. 

Après cette vie allemande, le bateau se trouve pris, malgré lui, dans la grande histoire. En 1945, un commando britannique saisit le navire, et le cède dans la foulée à titre de dommage de guerre, à la marine nationale française. Cette dernière ne sait pas bien que faire du trois-mâts, rebaptisé Duchesse Anne, et le laisse à son triste sort. Dans les années 1970, il n’est plus qu’une épave lorsqu’une association, composée de passionnés et d’anciens des chantiers navals dunkerquois, décide de le sauver et de le restaurer.

Symbole de la cité

À force, ils parviennent à convaincre la ville de Dunkerque d’acheter le bateau, pour un franc symbolique. Certes, ce n’est pas le Belem, un des derniers grands voiliers de commerce français du XIX siècle encore en navigation. Mais l’association et le territoire sentent tout de même qu’un trois-mâts, même sans voiles et même en mauvais état, peut permettre de soutenir la mémoire des docks et le rapport intime à la mer des Dunkerquois. C’est ainsi que la Duchesse Anne fait son entrée au port en septembre 1981, acquérant bientôt un statut de symbole de la cité de Jean Bart, tout comme le beffroi de Saint-Éloi ou le célèbre carnaval de la semaine de mardi gras. 

Désormais visitable et très visité (40.000 personnes, en 2023), le bateau fait partie « du cœur et de l’esprit des Dunkerquois », affirme Dany Dumelié, directeur des bâtiments à la ville et à la Communauté urbaine de Dunkerque (CUD). Il y a quelques années, une étude de diagnostic sur la structure du bateau est commandée à un bureau d’études. Infiltrations, dégradations, oxydation…  

« Nous l’avions entretenu et restauré, mais là, nous sommes allés de mauvaise surprise en mauvaise surprise » poursuit Dany Dumelié, qui résume : « Soit on le réparait, soit il coulait, ce qui n’était pas envisageable.» 

Mis devant la somme à débourser – 12 millions d’euros sur trois ans – ni la ville, ni la CUD, ni l’État (la Duchesse Anne est classée monument historique) ne flanchent. Votés à l’unanimité, les grands travaux ont finalement été lancés en janvier dernier.

« Reconstituer au plus près de la réalité »

Aujourd’hui, des barrières de chantier barrent l’accès au trois-mâts. Mesurant 100 mètres de long, et 12 mètres d’amplitude, le bateau n’a pu être remorqué, et c’est devant les curieux qu’il est en train d’être littéralement désossé. Sur le pont, en lieu et place de groupes d’enfants et de familles, on voit désormais des compagnons s’affairer. 

« L’acier est en train de rouiller et le navire fuit. À l’origine, il y avait un plancher en bois. Nous avons été obligés de le retirer, afin de pouvoir dépolluer la peinture au plomb, et démolir les 150 tonnes de béton dans la cale », explique Florence Vareilles, responsable de Naval Projects (réparation et maintenance navale) à qui la CUD a confié la gestion du chantier. 

Les entreprises de restauration viennent de la région, ce qui ajoute à l’intérêt des habitants. Il a fallu tout de même se tourner vers la Bretagne, terre d’expérience, pour trouver celle spécialisée dans les gréements. Elle a la lourde tâche de démonter les mâts de 48 mètres, nantis de plateformes pour les guetteurs d’autrefois, mais aussi les 15 vergues qui portaient les voiles. 

À l’intérieur de l’ancien navire-école, il faudra aussi tout reprendre, y compris les décors. En dehors de la cloche, il ne reste que peu d’éléments d’origine, tout ayant été pillé. Dorian Delongeville montre l’appartement du capitaine, consolidé dans les années 1990 par l’association des Amis de la Duchesse Anne, et qu’il veut réhabiliter.  

« Nous possédons des photos anciennes permettant de reconstituer et remeubler les espaces au plus près de la réalité », explique-t-il. Les éventuelles archives, attendues grâce à son appel aux dons, seraient évidemment un plus pour la restauration, ainsi que pour les médiateurs qui expliqueront la vie à bord. 

Avant cela, début juillet, le bateau sera transféré en cale sèche, pour être repeint, puis sera remis à quai fin décembre 2024. Les travaux de finition, dont la reconstitution des intérieurs ou la repose du pont sont annoncés au premier semestre 2025. Tout doit être prêt pour les Tall Ships Races qui, du 10 ou 13 juillet, passeront par la Manche et la mer du Nord, en s’arrêtant à Dunkerque. Après ce moment phare, la Duchesse Anne et le Musée portuaire à laquelle elle est liée, se chargeront de maintenir l’intérêt sur la grande épopée de la mer dans ce coin de France. Le musée, installé dans d’anciens entrepôts à tabac, possède des grandes façades en briques caractéristiques de l’activité commerciale du XIXe. 

On y croise la figure de Jean Bart, mais aussi celle des pêcheurs d‘Islande, ou l’épopée des chantiers, qui employaient autrefois 2500 salariés, sans compter les sous-traitants. Des outils professionnels rassemblés par les dockers dans les années 1970 voisinent avec des maquettes et des cartes, menant jusqu’au cap Horn, en Afrique ou en Asie. D’autres navires liés à l’histoire du port, le bateau-feu Sandettié, la péniche Guilde, la vedette Pilotine 1 et le remorqueur  ntreprenant parachèvent ce voyage, mêlant habilement des idées de rêve, de commerce et de dur labeur.

 

Adrian Irvin ROZEI

Boulogne, juin 2024

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