La nostra generazione ha sbagliato…* (II)

Paris, le 24/09/2021

« Notre génération s’est trompée ! »

C’est l’affirmation courageuse d’un grand de la chanson italienne.

Giorgio Gaberščik, connu sous le nom de scène de Giorgio Gaber (né le 25 janvier 1939 à Milan et mort le 1er janvier 2003 à Camaiore), est un chanteur, compositeur, acteur et ramaturge italien. Il était aussi un guitariste accompli, ainsi que l’auteur de l’une des premières hansons rock en italien. Cependant Gaber était attiré par la chanson française. Avec Sandro Luporini, il fut le pionnier du genre musical connu sous l’appellation « teatro canzone » (théâtre – chanson). 

J’ai découvert l’existence de Giorgio Gaber vers la fin des années ’70, grâce à un collègue de bureau d’origine italienne. Ses parents étaient des réfugiés politiques de l’époque mussolinienne et il était très fier des positions militantes de ce chanteur.

Moi, j’ai apprécié, dès la découverte de ses chansons, non seulement leur mélodicité et leur rythme, mais aussi le « bon sens » des affirmations de la vedette italienne ! C’était autre chose que « Belle, belle ! ». 

Je reconnais que j’ai écouté et réécouté ses chansons avant de comprendre les mots, le sens et d’en tirer « la substantifique moelle »** !   

Après des années de militantisme de gauche, après la faillite du communisme, Giorgio Gaber a sorti un disque intitulé : « La mia generazione ha perso (2001) » (Ma génération a perdu).

Mais, Giorgio Gaber n’a pas vécu assez longtemps pour vivre les autres faillites de notre génération : le communautarisme, la victimisation, les excès de l’écologisme etc., etc.

Et pourtant, il a écrit des textes prémonitoires !

Parmi eux, celui qui suit (en italien et traduction française automatique). 

La razza in estinzione – Giorgio Gaber

Je n’aime pas la fausse gaieté
Non mi piace la finta allegria
Je ne supporte pas non plus les dîners avec des amis
Non sopporto neanche le cene in compagnia
Et avec les jeunes je suis intransigeant
E coi giovani sono intransigente

De certaines modes, chansons et transgressions
Di certe mode, canzoni e trasgressioni
je m’en fiche
Non me ne frega niente

Et je m’ennuie aussi un peu
E sono anche un po’ annoiato
De ceux qui nous font la morale
Da chi ci fa la morale
Et ils exaltent la vie conjugale comme sacrée
Ed esalta come sacra la vita coniugale

Et puis il y a les gays qui ont toutes les raisons
E poi ci sono i gay che han tutte le ragioni
Mais je ne peux pas tolérer
Ma io non riesco a tollerare
Leurs exhibitions
Le loro esibizioni 

Je n’aime pas ceux qui sont trop solidaires
Non mi piace chi è troppo solidale
Et qui le convertissent en  professionnalisme du social
E fa il professionista del sociale
Mais qui spécule sur qui est malade
Ma chi specula su chi è malato
Sur les handicapés, les toxicomanes et les personnes âgées
Su disabili, tossici e anziani
C’est un vrai criminel
È un vero criminale

Mais je ne vois plus personne se mettre en colère
Ma non vedo più nessuno che s’incazza
De tous les accros de la nouvelle race
Fra tutti gli assuefatti della nuova razza
Et qui invente une bonne fête
E chi si inventa un bel partito
Pour notre bien
Per il nostro bene

Il semble juste destiné
Sembra proprio destinato
A devenir un imbécile.
A diventare un buffone.

Mais peut-être que j’en fais partie
Ma forse sono io che faccio parte
D’une race
Di una razza
En extinction.
In estinzione.
 

Ma génération a vu
La mia generazione ha visto
Les rues, les places bondées
Le strade, le piazze gremite
De gens passionnés
Di gente appassionata
Sûr de donner un sens à votre vie
Sicura di ridare un senso alla propria vita

Mais maintenant, ce sont toutes des choses du siècle passé
Ma ormai son tutte cose del secolo scorso
Ma génération a perdue.
La mia generazione ha perso. 

Je n’aime pas le trop d’information
Non mi piace la troppa informazione
Je déteste aussi les journaux et la télévision
Odio anche i giornali e la televisione
La culture pour les masses est un non-sens
La cultura per le masse è un’idiozia

La file d’attente avec des sandwichs devant les musées
La fila coi panini davanti ai musei
Cela me rend mélancolique.
Mi fa malinconia.

Et la technologie nous mènera loin
E la tecnologia ci porterà lontano
Mais il n’y a plus personne qui sache l’italien (ou le français ?)
Ma non c’è più nessuno che sappia l’italiano

La bonne chose à propos de l’école
C’è di buono che la scuola
s’est mise au goût du jour d’urgence
Si aggiorna con urgenza
Et avec tous les nouveaux quiz
E con tutti i nuovi quiz
Nous garantit l’ignorance.
Ci garantisce l’ignoranza. 

Je n’aime aucune idéologie
Non mi piace nessuna ideologia
Je n’encourage même pas la démocratie
Non faccio neanche il tifo per la democrazia

Il y a beaucoup de gens qui parlent
Di gente che ha da dire ce n’è tanta
La qualité n’est pas requise
La qualità non è richiesta
C’est le nombre qui compte
È il numero che conta

Et j’aime de moins en moins mon pays
E anche il mio paese mi piace sempre meno
Je ne crois plus à l’ingéniosité du peuple italien
Non credo più all’ingegno del popolo italiano
Où chaque intellectuel donne son avis
Dove ogni intellettuale fa opinione

Mais si vous le regardez attentivement
Ma se lo guardi bene
C’est le crétin habituel
È il solito coglione

Mais peut-être que j’en fais partie
Ma forse sono io che faccio parte
D’une race
Di una razza
En extinction.
In estinzione.
 

Ma génération a vu
La mia generazione ha visto

Des milliers d’enfants prêts à tout
Migliaia di ragazzi pronti a tutto
ils cherchaient
Che stavano cercando
Peut-être avec un peu de présomption
Magari con un po’ di presunzione
A changer le monde
Di cambiare il mondo

On peut en parler aux enfants
Possiamo raccontarlo ai figli
Sans aucun remords
Senza alcun rimorso
Mais ma génération a perdu.
Ma la mia generazione ha perso. 

Je n’aime pas le marché globalisé
Non mi piace il mercato globale
Qui est le paradis de toutes les multinationales
Che è il paradiso di ogni multinazionale

Et un jour, ne t’en fais pas,
E un domani state pur tranquilli
Il y aura toujours des plus pauvres et des plus riche
Ci saranno sempre più poveri e più ricchi
Mais tous plus idiots.
Ma tutti più imbecilli.

Et j’imagine un futur
E immagino un futuro
Sans aucune solution
Senza alcun rimedio
Une sorte de masse
Una specie di massa
Sans aucune individualité
Senza più un individuo

Et je vois notre état
E vedo il nostro stato
Qui est craintif et impuissant
Che è pavido e impotente
Qui s’effondre de plus en plus
È sempre più allo sfascio

Et ils s’en foutent
E non gliene frega niente

Et je vois aussi une église
E vedo anche una Chiesa
Qui se presse plus que jamais
Che incalza più che mai
j’aimerais que ça coule
Io vorrei che sprofondasse
Avec tous les Papes et les Jubilés
Con tutti i Papi e i Giubilei 

Mais c’est une vue de l’esprit
Ma questa è un’astrazione
C’est l’idée de celui qui  appartient
È un’idea di chi appartiene
à une race
A una razza
En extinction.
In estinzione.

 –

Parmi les chansons de Giorgio Gaber, il y en a une qui dit :

Giorgio Gaber — E ALLORA DAI 

« E allora dai, e allora dai
Le cose giuste tu le sai
E allora dai, e allora dai
Dimmi perché tu non le fai »
 

En français :

« Alors viens, alors viens / Tu connais les choses correctes / Alors viens, alors viens / Dis-moi pourquoi tu ne les fais pas » 

Cella me rappelle le précipice entre les affirmations de nos hommes politiques et leurs agissements ! 

** « Extraire « la substantifique moelle » de quelque chose, c’est en retenir ce qu’il y a de meilleur, de plus précieux ou de plus profond.

Dès la fin du xiie siècle, le mot « moelle » désigne, en plus de la substance molle que l’on trouve à l’intérieur des os, ce qu’il y a d’essentiel, en particulier dans une œuvre de l’esprit.

Cette expression devint célèbre en 1534 lorsque François Rabelais l’utilisa dans le prologue de son deuxième roman Gargantua. »

 

Adrian Irvin ROZEI

Paris, septembre 2021

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