Rome, 07/06/2022
Le prochain objectif sur ma liste est « Le Grand Hôtel », toujours dans la Via Orlando.
En réalité, ceci est le nom « historique » de l’hôtel devenu aujourd’hui « Hôtel The St. Regis Rome » qui fait partie du groupe Marriott. Mais, comme les propriétaires des grands hôtels, partout dans le monde, changent… comme moi je change de chemise, pour moi il restera toujours, « Le Grand Hôtel » !
Par exemple, il semblerait que mon cher « Athénée Palace » de Bucarest, qui fait partie, depuis sa dernière restauration, du groupe « Hilton », deviendra « Intercontinental » à la fin de cette année.
Grand bien leur fasse ! Pour moi, il sera toujours « Athénée Palace », comme en 1914 à son ouverture !
Je connais « Le Grand Hôtel » de Rome… depuis un demi-siècle !
Même si je n’y ai jamais couché ! Je ne dispose pas des 1000 Euro minimum, qu’exige, pour une nuit, Booking.com ou Trip.com !
Ce qui ne veut pas dire que je n’y ai pas dormi. Parce que, cet endroit fait partie, comme « L’Excelsior » ou le « Minerve », des hôtels où j’aime bien faire une petite sieste dans l’après-midi, les jours de grande chaleur à Rome.
Selon Wikipedia,
« Situé entre la fontaine de Moïse et la Piazza Della Repubblica, ce luxueux hôtel est aménagé dans un palais de style belle époque. Il se trouve à 3 minutes à pied de la station de métro Repubblica et à 14 minutes de la fontaine de Trevi.
Les chambres luxueuses sont remplies d’antiquités et dotées d’une salle de bain en marbre, de fresques au mur, du Wi-Fi gratuit et d’une télévision avec les chaînes par câble.
L’établissement possède un restaurant méditerranéen décoré d’œuvres d’art, une salle de bal luxueuse, un spa chic, et un bar somptueux qui sert le thé de l’après-midi. »
Si je n’ai jamais couché dans cet établissement, j’ai, quand-même déjeuné, une ou deux fois, le prix du menu de midi au « restaurant méditerranéen » étant plus que raisonnable.
Mais, mon meilleur souvenir au « GRAND HÔTEL » date d’il y a quelques années. A mon passage, on était en train de réinstaller les ferronneries nouvellement dorées devant la porte d’entrée. Il se trouve que nous venions de rénover la grille de notre maison de campagne.
J’ai profité, donc, pour échanger « en spécialiste !» quelques avis avec les artisans qui installaient ces mains-courantes.
Depuis, à chaque passage « je vérifie » que la dorure a bien résisté ! A ce jour… tout va bien ! LOL
Mais, j’ai profité de l’occasion pour faire un tour dans les couloirs de l’hôtel. Ici, je suis tombé nez-à-nez avec le buste de Trajan. A ma grande déception, ce buste était… en plastique ! A la grande différence des autres bustes, en superbe marbre polychrome.
Nobody is perfect! Même les 5*!
* * *
Ma prochaine étape est une église que j’aime particulièrement !
Parce qu’ il s’agit d’un endroit multi-historique, mais très intime, propre au recueillement, puisque si peu fréquenté.
Il s’agit de l’église San Bernardo alle Terme (en français : église Saint-Bernard-des-Thermes).
Cette église fait partie de l’ensemble antique des thermes de Dioclétien. Elle est dédiée au moine Bernard de Clairvaux.
L’église fut construite en 1598 à la suite de la restructuration du sphaeristerium, bâtiment consacré aux jeux de balle, des thermes de Dioclétien. L’architecture particulière de cette église est similaire à celle du Panthéon de Rome avec une grande salle circulaire de 22 mètres de diamètre, surmontée d’une coupole à caissons octogonaux percée d’un oculus, et flanquée de nombreuses niches périphériques accueillant huit statues de Camillo Mariani, chefs-d’œuvre de l’artiste, réalisées entre 1600 et 1603.
C’est l’assemblage « antique/baroque/moderne » de cet endroit qui me fascine. Tout comme la fraîcheur qui y règne, les jours de grande chaleur. C’est le cas, aujourd’hui !
Et puis, accolé à l’église, se trouve un très sympathique bistrot romain, qui s’appelle… vous l’avez deviné ? « Oratorio » !
Ces derniers temps, cet endroit est devenu « à la mode ». On peut y rencontrer les « cadres dynamiques, résolument tournés vers l’avenir » du quartier !
Cette fois-ci, si j’y suis entré, ce n’est pas pour déjeuner ! Même si je suis monté sur la terrasse… qui était « privatisée », justement pour ce type de clientèle.
Je vous confie un secret ! Depuis cette terrasse, l’on peut jeter un coup d’œil sur « la cour des copies antiques », pour s’assurer que cet endroit étrange fonctionne encore !
Mais, pour ce sujet, je reviendrai… après le déjeuner !
* * *
Pour mon déjeuner, j’ai choisi un endroit, juste en face du bistrot mentionné précédemment, toujours dans la Via Torino au no. 45.
Je connaissais bien l’hôtel qui se trouve à cet endroit. J’aime énormément les fresques « street-art » de l’entrée, pour la qualité du dessin et leur humour sous-jacent. Je les ai découvertes, il y a quelques années, alors qu’elles venaient d’être réalisées par plusieurs peintres. Entretemps, on y a rajouté d’autres fresques, tout aussi drôles.
A l’époque, j’ai échangé quelques mots avec le réceptionniste de l’hôtel. J’ai découvert ainsi qu’il était brésilien. Comme je venais de rentrer du Brésil, nous avions quelques sujets de conversation en commun.
A ma grande surprise, après tous ces temps mouvementés, il était encore là !
Par contre, je ne me souvenais pas du restaurant « The Barrel by Tyler », qui se trouve, justement dans cette entrée. Je ne pense pas qu’il existait, à mon précédent passage.
Sa décoration m’a interpellé (comme on dit de nos jours !). Tout autant que ses prix très abordables. Et, en déjeunant ici, j’ai constaté que les plats présentaient autant d’originalité que la décoration.
D’ailleurs, autour de moi, j’ai reconnu les employés du quartier, qui passaient déjeuner « sur le pouce » en moins de 30 minutes.
Une expérience originale !
* * *
Si je suis resté une heure de plus dans le quartier, c’est parce que j’espérais avoir la chance de trouver les portes de « la cour des copies antiques » ouvertes !
Ici, il n’y a pas d’enseigne mais, seulement depuis peu de temps, une indication concernant les heures d’ouverture. Qui, en vérité, restent assez aléatoires : « ça dépend du courant, ça dépend de la vitesse du vent » et, surtout, des jours de pluie ou de beau temps !
Mais, au mois de juin, j’avais mis toutes les chances de mon côté !
Pourtant, cet endroit a eu un rapport avec l’art depuis… 1804 !
L’atelier Filonzi était, à l’époque, le fournisseur en objets d’art des riches demeures romaines, allant jusqu’à celle du pape.
Selon mes informations, le propriétaire du lieu est un maçon du nom de Domenico Persiani. Il fabrique, aussi, des copies d’antiques, tout comme ses propres sculptures.
Une fois entré dans cette cour, coincée entre la Via Torino et l’Oratorio, on découvre un fouillis étudié, qui ressemble davantage à une boutique du Marché aux Puces, qu’à une galerie d’art. Mais, celui qui a la patience de chercher dans tous les coins, peut y rencontrer son bonheur. Qui va de la statue de la Vierge ou de la déesse Vénus, d’une hauteur de 10cm., jusqu’à la fontaine murale en pierre (recomposée) de quelques tonnes.
En y entrant, cette fois-ci, je suis tombé sur une chose que je connais fort bien : ce sont les statues des « putti » que nous avons dans le Languedoc (celui qui joue de la flute de Pan et celui qui l’accompagne au tambourin).
J’ai commencé par les étudier sous toutes les coutures. Même les rayures du socle ! Ils étaient identiques aux miens !
Avant de commencer mon « étude de marché », j’ai demandé quelques prix pour des objets de moindre importance, que, de toute façon, je n’aurais pas pu emporter, vu leur poids. Mais, la boutique se charge de l’expédition, si nécessaire.
Le but de mes demandes était de « tester » les niveaux de prix pratiqués. J’ai vite compris que l’endroit n’était plus celui que j’avais connu d’antan. On sentait qu’il était devenu une référence des guides internationaux !
Pour les putti, on m’a demandé 250Euro/pièce. Alors que moi j’avais payé, à Pézenas, 300Euro… pour le couple !
Et, par la suite, j’avais découvert qu’une maison du Portugal les proposait, en série, à moitié prix. Malheureusement, cette maison qui livrait aux quatre coins de l’Europe, a disparue… pendant le Covid !
En discutant avec la propriétaire des lieux, qui se trouve être française, elle m’a affirmé, haut et fort, que ses putti ont été fabriqués en Italie, par un artisan de sa connaissance.
Ensuite, une fois nos arguments échangés, la dame m’a lancé : « Aujourd’hui, vous avez des ateliers qui exécutent les mêmes copies partout, même en Roumanie ! »
« Voilà une nouvelle qu’elle est bonne ! », comme disait Coluche. Maintenant, je sais ou je dois m’adresser pour ce type d’objet, qui n’a rien d’historique.
J’ai arrêté ma discussion et je suis reparti, en saluant poliment !
* * *
Pour l’étape suivante de mon périple, je n’ai eu qu’à traverser la Piazza San Bernardo, à l’angle de la Via XX Settembre.
Au passage, j’ai jeté un coup d’œil à la Fontaine de Moïse.
« La Fontana dell’Acqua Felice (du nom de baptême du Pape Sixte V, Felice Peretti, commanditaire de la fontaine) fut bâtie par Domenico Fontana entre 1585 et 1587. C’est une fontaine en portique…
L’ancien mont Quirinal (Monte Cavallo) manquait d’eau: Sixte dépense alors soixante mille écus romains pour amener la source, appelée de son nom de baptême, Felice, sur la place de Sainte-Suzanne, prise au col delle Pantanelle, près du village de la Colonna, qui est à quatorze milles de Rome, et destinée à alimenter les quartiers du Quirinal, du Monte Pincio et du Capitole. Au bout de dix-huit mois de travail, cette source arrivait à Rome. »
C’est Domenico Fontana, (quel nom prédestiné !) architecte attitré de Sixte V qui a élevé le monument dont les trois arcades doivent couvrir les statues de Moïse, faisant jaillir l’eau du rocher.
La fontaine jouxte mon cher « Grand Hôtel », où j’avais pris les précautions nécessaires en ce qui concerne l’eau… des toilettes !
En traversant la Place Sainte-Suzanne, j’ai été frappé par l’attroupement devant l’Eglise Santa Maria della Vittoria. On aurait dit la queue pour la « distribution » de la viande, à Bucarest, du temps de Ceauşescu !
J’étais un peu étonné de cette ferveur subite !
En demandant la raison à une dame, bien placée dans la queue, on m’a répondu (en anglais) : « Nous attendons l’ouverture des portes. Il y a, à l’intérieur, une statue du Bernin ! »
Bon, j’ai compris ! Les guides touristiques frappent de nouveau !
J’ai attendu, sous un soleil de plomb, que « la ferveur » des touristes américains passe. Parce que, je venais ici, justement pour la statue de Sainte Thérèse.
« L’église Santa Maria della Vittoria de Rome est connue pour sa statue du Bernin, l’Extase de sainte Thérèse, (réalisée entre 1644 et 1652) pour le cardinal vénitien Federico Cornaro.
La chapelle qui abrite la statue est en forme de théâtre, et les personnages de la famille Cornaro semblent profiter du spectacle, représentés sur les parois latérales. La journée, la lumière éclaire Thérèse et l’ange de telle manière qu’elle semble venir des rayons de bronze à l’arrière-plan, accentuant le mystère de cette extase. »
Mais, pour celui qui cherche à approfondir les raisons de cette scène, une multitude d’affirmations se bousculent :
« La position du corps de sainte Thérèse et l’expression de son visage, ont conduit certains observateurs, tel Jacques Lacan, à les expliquer comme le signe d’un moment d’extase sexuelle.
« […] pour Sainte Thérèse, enfin disons quand même le mot… et puis en plus vous avez qu’à aller regarder dans une certaine église à Rome la statue du Bernin pour comprendre tout de suite …enfin quoi : qu’elle jouit, ça fait pas de doute ! Et de quoi jouit-elle ? Il est clair que le témoignage essentiel de la mystique c’est justement de dire ça : qu’ils l’éprouvent mais qu’ils n’en savent rien. »
Les spécialistes du baroque mettent cette théorie en doute. Ainsi Nicolas Mattei, dans sa conférence sur l’art baroque, Sainte Thérèse d’Avila par Le Bernin en décembre 2009, déclare : « Elle jouit, Thérèse, disait Lacan ! Notre époque, excessivement marquée par Freud et la psychanalyse, une psychanalyse trop souvent démocratisée pour ne pas dire de bazar, ne peut voir ici qu’une extase tout ce qu’il y a de plus physique. Il s’agit cependant d’une extase mystique. »
Moi, je souhaitais me faire une idée personnelle à ce sujet. Mais, à mon dernier passage dans ce lieu, la chapelle était en pleine réfection et la statue entourée d’un horrible échafaudage en bois.
Cette fois, j’ai dû attendre une bonne vingtaine de minutes avant de me retrouver en tête-à-tête avec la Sainte.
Malgré notre intimité, elle ne m’a pas fait ses confidences.
Mais, j’ai appris, grâce à d’autres sources, que
« en dépit ou à cause de l’ambiguïté de la sculpture, la capelle devint immédiatement un pôle d’attraction pour les visiteurs, et le demeure. Le cardinal était si satisfait qu’il augmenta délibérément la somme promise au Bernin. »
Comme disait le Cardinal de Retz : « On ne sort de l’ambiguïté qu’à ses dépens »
* * *
J’ai continué mon périple en descendant la Via Barberini.
Une fois arrivé à la Fontana del Tritone, j’ai eu un doute : cinq voies s’ouvraient devant moi. Laquelle devrais-je prendre ?
Après une courte réflexion, j’ai choisi la «Via delle Quattro Fontane ».
Pourquoi ça ? Simple ! Je comptais m’arrêter au Palazzo Barberini pour saluer ma chouchoute… La Fornarina, pour laquelle j’ai un faible particulier !
La mia bella Fornarina al balcone non c’è più!!! (II)
La mia bella Fornarina al balcone non c’è più!!! (I)
En entrant dans le jardin du Palais, j’ai remarqué que la statue du sculpteur Thorvalsen, qui, à mon précédent passage, ne tenait debout que par un cerclage en métal, avait été restaurée, renforcée et ravalée.
Tant mieux !
Dans ces conditions, j’ai cherché un peu plus d’informations sur cet artiste.
« Bertel Thorvaldsen né le 9 novembre 1770 à Copenhague et mort le 24 mars 1844 dans la même ville est un sculpteur danois, principalement actif en Italie. »
Tout s’explique ! Voici pourquoi il est présent dans le jardin du Palazzo Barberini !
Mais, ce n’est qu’en feuilletant un numéro du magazine « ANTIQUARIATO », que j’ai découvert l’existence du Musée Thorvaldsen de Copenhague. Et, j’ai découvert que l’un des couloirs de ce musée abrite la même statue du «Phidias danois, l’éternel rival de Canova», que celle du dit jardin.
Mais, ma grande déception fût au moment où j’ai découvert, à l’entrée du Musée, que ma chère Fornarina était partie en voyage… à Londres !
J’ai fait, quand même un tour dans les salles du musée, pour voir et revoir rapidement d’autres chefs-d’œuvre déjà vus et revus.
Mais, j’avoue avoir trahi ma Fornarina avec… Blanche-Neige !
Eh, oui ! « Qui va à la chasse perd sa place ! »
Le Palais Barberini présentait, pendant cinq mois, l’exposition « Disney L’arte di racontare storie senza tempo ».
Ainsi, j’ai pu admirer le cheminement d’un personnage des studios cinématographiques depuis le croquis sur un bout de papier, jusqu’à l’image sur grand écran.
Une leçon de fantaisie, d’imagination et …de travail !
A suivre…
Adrian Irvin ROZEI
Roma, juin 2022
AMD de Versailles écrit :
Merci pour cette promenade à Rome
Cette statue de Sainte Thérèse d’Avila par le Bernin est très connue et représente en effet l’Extase Mystique …que cette Sainte, Docteur de l’Eglise éprouvait souvent.
Enfin c’est toujours ce que l’on en dit…
Mais, intriguée par ton observation que j’ai pensé être ton phantasme, j’ai regardé sur internet et en effet certains y voient une expression due à tout autre choses de plus « choquant » à l’époque et interdit par les biens- pensants surtout quand il s’agit d’une personne à la Spiritualité supérieure au commun des mortels …
15 années d’école religieuse et des cours d’espagnol très stricts et à une époque lointaine, celle de ma prime jeunesse, il est évident que jamais pareille interprétation n’aurait pu être envisagée !
Il est écrit sur internet que Le Bernin avait « joué » sur l’ambiguïté.
MBG de Genève dit :
Bonsoir Adrian,
Votre article m’a rappelé quelques bons souvenirs récents.
Mon hôtel était non loin du palais Barberini et j’ai, bien sûr, emprunté la « Via delle Quattro fontane ». Pourquoi? Vous le saurez dans le prochain 3 R.
A propos de sainte Thérèse et de ce qu’elle est censée manifester, vous n’avez pas utilisé le mot “épectase”, du grec “έπεκτασις ” qui veut dire “extension, allongement”. L’église catholique a réorienté le terme en lui ajoutant la précision qu’il s’agirait de tension de l’âme vers Dieu.
Enfin, le “Canard enchaîné” l’a dévoyé, disant qu’il signifierait “mort pendant l’orgasme”. L’hebdomadaire avait fait des gorges chaudes lors du décès, en 1974, du cardinal Daniélou à l’occasion d’une visite (“pastorale ?”, ironisait le journal) à une prostituée au 56 de la rue Dulong dans le 17ème arrondissement.
Ce qui avait déclenché une telle hilarité avait été l’éloge funèbre du personnage faite dans “le Figaro” par le père Tillette qui avait dit que c’était “dans l’épectase de l’Apôtre qu’il était allé à la rencontre du Dieu Vivant”?