La Bastide Vieille, le 4/04/2021
La Place Vendôme était vide,
On ne reconnaissait plus Paris!
Ils ont tous peur du COVID.
Quelle folie !
(D’après Gilbert Bécaud – « Nathalie »)
Comment pouvais-je imaginer que les canards de Boulogne… regardent la télé ? Et pourtant !
Quand j’ai vu arriver, pour la première fois, les trois canards sur la pelouse à Boulogne-Billancourt, devant notre résidence, c’était au mois de mars 2020, juste après le début du premier confinement.
En regardant de près, nous avons constaté qu’il s’agissait d’ « une Daisy et de deux Donald » !
Drôle de famille ! Comme affirmaient les critiques de théâtre dans la Roumanie communiste de ma jeunesse, « le traditionnel triangle bourgeois : elle, lui et… l’ami de la famille ».
J’ai écrit alors, dans un texte (en roumain !) intitulé,
Post Covidum homo triste est !* (I) :
« Cependant, mon moment préféré a été celui où, vers 19h00, une famille de canards est arrivée, probablement des bords de la Seine voisine. Famille étrange! Une “Daisy” et deux “Donald” qui “fonctionnaient” ensemble! ».
Par la suite, j’ai appris, grâce à un voisin qui les nourrit depuis des années, que le Donald clair est le premier mari de Daisy, alors que le Donald plus foncé (et plus jeune !) est le second. Mais, apparemment, ce dernier accepte la présence du premier compagnon, à la condition qu’il reste… plutôt éloigné de sa dame ! Drôle de mœurs ! Une fois le confinement levé, les canards ont disparu.
Et bien, voilà que dès que les « mesures de restrictions sanitaires » annoncées à la télé ou par voie de presse, ces derniers jours, ont été connues, nos canards ont refait leur apparition ! D’abord, à deux et, ensuite, tous les trois.
Peut-être qu’ils ont lu le journal du vendredi 2 Avril !
Dans ce cas, ils ont découvert, tout comme les lecteurs bipèdes qu’ « une majorité de Français approuvent les mesures de restriction, mais une large partie d’entre eux ne compte pas les appliquer scrupuleusement. »
J’avoue que, me trouvant à quelques 900 Km de Boulogne, je n’ai pas pu demander au trois canards leur avis à ce sujet, que je suppose certainement très pertinent, puisqu’ils suivent au jour-le-jour les sages décisions de ceux qui nous dirigent !
Mais, je pense qu’ils ne sont pas très affectés par la limitation des 10 Km « à vol d’oiseau », que l’on nous impose à nous, pauvres humains.
Eux, qui peuvent emprunter « la voie des airs », …s’en fichent un peu !
* * *
Pour nous, c’est une toute autre affaire !
Je me suis jeté, des que j’ai appris cette nouvelle, sur le nouveau site, gentiment ouvert par les autorités, afin de découvrir, de manière officielle, jusqu’où nous avons le droit d’aller, pendant les quatre semaines à venir.
Eh bien, qu’ai-je découvert ?
Si nous avons le droit de gambader dans les quelques villages qui entourent notre domicile actuel, et cela depuis plus de 10 mois, nous aurons beaucoup de mal à accéder à « la Grande ville » la plus proche. J’ai nommé, vous l’avez compris : « Béziers » !
Par exemple, nous avons le droit d’aller à la Cathédrale St. Nazaire, mais pas sur les « Allées Paul Riquet », le centre historique de la ville.
Et, pas de chance !, pour atteindre le parvis de la Cathédrale, il faut passer par… les Allées ! A moins… de prendre « la voie des airs », comme nos gentils petits canards !
Certes, il y a la possibilité d’escalader le promontoire sur lequel se dresse la Cathédrale, depuis le cours de l’Orb. Mais, cela exige un certain entrainement qui, pour l’instant, n’est pas à ma portée !
Je compte commencer, dés demain, a m’y mettre !*
* * *
En attendant, nous nous sommes demandés comment allons nous passer la dernière journée de liberté.
Liberté… conditionnelle, car, depuis un bon bout de temps, déjà, nous devons être de retour dans nos foyers avant le « couvre-feu ». Qui est passé de 18 h à 19h, au fil de l’évolution de la pandémie.
« A la guerre, comme à la guerre ! » Puisqu’on nous a expliqué, il y a un an déjà, que « nous sommes en guerre » !
A l’occasion du précédent « confinement », le 29/10/2020, nous sommes allés, comme tant d’autres habitants de la France, dans un de nos restaurants favoris, puis on a continué avec une tournée « shopping » à Béziers, dans différentes boutiques de la ville.
Mais, cette fois-ci… pas de restaurants ou boutiques ouverts !
Alors, nous avons décidé de faire « le Grand tour » !
Ce « tour » mis au point de longue date, au départ de la Bastide, passe par Faugères, Bédarieux, Salasc, le lac du Salagou, Clermont-l’Hérault, Béziers et se termine à la Bastide Vieille.
Autrement dit, traverse une partie du Parc National du Haut-Languedoc et de la Vallée du Salagou. Mais, à cause des limitations horaires, nous avons dû renoncer aux visites de bon nombre d’endroits charmants et historiques, comme Lamalou-les-Bains, Villeneuve-l’Argentière, Mourèze, Villeneuvette ou Pézenas. Et tant d’autres, à droite et à gauche de ce trajet plutôt squelettique, mais qui, de toute façon, demande à être fait et refait d’innombrables fois.
Qui plus est, le « timing » du trajet devait, cette fois-ci, tenir compte de la fermeture des restaurants, donc de l’endroit où l’on peut déjeuner de manière confortable, et non au bord de la route ou sur un parking de pompe à essence !
On comprend donc la raison majeure qui nous a imposé le moment d’arrivée à la « Maison en pain d’épice », notre autre point de chute dans la région.
Bien sûr, ce voyage avait aussi quelques buts pratiques. Sachant que nous ne pourrons pas y retourner pendant plusieurs semaines, il fallait régler certains problèmes liés à l’intendance.
Et, entre autres, prendre les photos nécessaires pour illustrer ce texte !
Néanmoins, en dépit de toutes ces contraintes inhabituelles, nous avons eu beaucoup de chance :
-une température de plein été, frisant par moment les 26°C,
-la végétation en pleine floraison, qui change en fonction de l’altitude,
-un ciel bleu et pur de printemps.
Mais, il faut croire que nous n’étions pas les seuls à avoir eu l’idée de « la fuite à la campagne avant le confinement ». Parce que, même dans cette région plutôt escarpée… nous n’étions pas seuls sur la route !
Nous en avons, quand même, bien profité !
Dans un premier temps, nous avons croisé, de loin ou en les traversant, les villages colorés de la plaine du Languedoc.
Ensuite, nous avons entamé la montée vers les « sommets » du Parc Naturel Régional du Haut-Languedoc, en prenant des voies sinueuses et des tunnels !
Nous voilà arrivés à Bédarieux !
La ville, si colorée, nous est fort bien connue : c’est le « berceau » de la famille maternelle de mon épouse.
Nous sommes passés, d’ailleurs, devant le monument de Pierre Cot, inauguré en 1901 par le maire de l’époque, un ancêtre de ma femme.
La ville était éclairée par le soleil printanier. Contrairement à l’affirmation de ma belle-mère, qui soutenait haut et fort que « à Bédarieux, l’endroit le mieux éclairé par le soleil est… le cimetière ! ».
Nous y sommes allés, pour vérifier (aussi !) cette affirmation.
C’est exact ! Non seulement que l’endroit est resplendissant grâce aux arbres en pleine fleur, mais la vue sur la vallée est encore plus belle en Avril !
Mais, ce cimetière, que je connais depuis des décennies, me réserve, à chaque fois, une surprise !
Cette fois-ci, j’ai découvert la tombe d’une certaine… « Vve. Pinochet » !
Un quelconque rapport avec le Chili ? Affaire à suivre !
Nous voilà repartis… par la « route des crêtes » !
En doublant les fourmis géantes (en métal !) d’un Rond-point ou les installations industrielles restaurées d’un autre.
Ensuite, la longue ligne droite du plateau de Carlencas, en « plongeant » au long d’une route en lacets, qui frise le Cirque de Mourèze, avec sa faune mégalithique découpé dans la roche par les éléments naturels, avant d’arriver dans la vallée du Salagou. Quelle variété de paysages !
Et combien de petits villages (Salasc, Octon, Mérifons…) fleuris, colorés et bourrés d’histoire !
Mais, en ce week-end de Pâques, tous les restaurants sont fermés, tout comme et les boutiques qui ont des rideaux baisés ! Quel dommage !
Et, tout d’un coup, … la merveille ! Un champ fleuri de colza jaune… à perte de vue !
A peine quelques kilomètres plus loin, un paysage lunaire ! Ou, plutôt, martien !
La ruffe ** rouge annonce l’arrivée du Lac du Salagou, avec son « mini-volcan », son village abandonné et ressuscité de Celles, le Pic St. Jean, à la silhouette « mini-Himalayenne », découpé sur le bleu du ciel sans nuages.
Ici, une fois traversés « les détroits », nous sommes « à la maison » !
Si les vues plongeantes sur le lac percent toujours avec leurs reflets vert/bleu, la montée vers Liausson devient de plus en plus vert tendre, grâce aux vignes qui bourgeonnent***.
Puis, une fois le village dépassé, la forêt de pins se pare des couleurs vert foncé des conifères.
Quel dommage de ne pas pouvoir s’arrêter un moment, pour contempler le lac, depuis la terrasse de l’église, qui le surplombe !
L’endroit nous rappelle plein de souvenirs : notre mariage, les baptêmes des enfants…
Mais, le temps presse ! Et la faim… commence à nous tarauder !
Quelle chance ! La « Maison en pain d’épice » nous attend. Avec « ses puissantes installations »**** !
Et une prairie vert tendre, ponctuée de pissenlits jaune vif.
Déjeuner en plein soleil, à l’ombre des pins ou des platanes… c’est le bonheur absolu !
Il faut faire provision de ce « bonheur » ! Il nous sera interdit, au moins pendant quelques semaines !
Mais, quelque soit l’emploi du temps, nous ne pouvons pas sauter l’étape de la descente au lac !
Tout comme nous, des dizaines de personnes sont venues, à l’occasion du week-end de Pâques, pour piqueniquer, jouer aux boules, s’entraîner aux sports martiaux ou au basket, glisser, poussés par le vent, sur les vagues du lac…
Ou, tout simplement, faire un brin de bronzette !
Maintenant, le temps presse !
Il faut arriver à la Bastide Vieille, notre domicile, avant 19 heures ! Au risque, en cas de retard, de se voire ponctionné de 135Euro d’amende par personne!
On traverse la ville de Clermont-l’Hérault sans regarder, ni à gauche, ni à droite ! Tout droit, devant !
On prend l’autoroute et… nous voilà à Béziers !
Cette fois-ci, on a choisi de traverser la ville !
Ça nous permet de regarder, en passant, la partie qui nous sera interdite… dans une heure ! Parce que le « couvre-feu » démarre à 19 heures et les nouvelles règles… dés le lendemain !
Nous regardons avec davantage d’attention que d’habitude le centre-ville.
C’est pas si mal ! Ce serait la tentation du « fruit défendu » ?
Je ne sais pas pourquoi, j’ai le sentiment de me retrouver pendant la dernière Guerre Mondiale. Avec la « Zone occupée » et la « Zone NONO ».
Il va falloir que je trouve un « passeur », si je souhaite revoir les « Allées Paul Riquet » !
Une fois à la maison, je vais essayer de retrouver, sur ma vieille T.S.F., la voix de Londres et « Les Français parlent aux Français ! ».
Au moins, si Pierre Dac pouvait revenir !
« A la guerre, comme à la guerre ! »
Adrian Irvin ROZEI
La Bastide Vieille, avril 2021
–
*Un accès piétonnier, depuis les Ecluses de Fonsérane jusqu’au parvis de la Cathédrale, renforcé par un ascenseur dans sa dernière partie, est en cours de construction depuis un bon moment.
Des travaux énormes, qui exigent des mois et des mois d’efforts. J’espère que ce troisième confinement, qui ne dit pas son nom, sera levé avant l’achèvement des travaux !
Si Dieu le veut !
**« Ruffe » est le nom local employé dans l’Hérault pour désigner les terres rouges formées de pélites, une classe de roches sédimentaires détritiques dont les éléments ont un diamètre inférieur à 1/16 mm.
*** Je viens de découvrir, il y a à peine quelques jours, une vue du lac du Salagou totalement différente !
Depuis la bergerie de Germane, un endroit avec, au moins, deux siècles d’existence, le lac, blotti entre les parois verdoyantes des collines sur lesquelles s’appuie le barrage, ressemble à… un fjord norvégien !
Un « anachronisme » étonnant !
**** Mon père m’a raconté tant de fois que, alors qu’il était élève à l’Ecole des Mines de St. Etienne, dans les années ’20, il a eu comme professeur de métallurgie, Pierre Antoine Jean Sylvestre CHEVENARD (1888-1960).
Pierre Chevenard a été
« Professeur à l’Ecole des mines de St Etienne de 1919 à 1935 et à l’Ecole des mines de Paris à partir de 1942.
Ses remarquables travaux sur les aciers spéciaux lui vaudront notamment d’entrer à l’Académie des Sciences, de présider la société des Ingénieurs civils, et d’être membre du Conseil supérieur de la recherche scientifique (1951), vice-président du conseil scientifique de l’ONERA, vice-président de la Société de l’industrie minérale, président de la Société française de physique.
Le perfectionnement de la méthode dilatométrique et la création d’appareils à enregistrement automatique furent ses premières préoccupations. »
Pendant ses cours, Pierre Chevenard conseillait à ses élèves de profiter de chaque rencontre avec un patron de l’industrie pour lui glisser la formule : « vos puissantes installations » !
Je ne peux pas y déroger ! Même si, dans notre cas, il s’agit seulement d’un frigo et d’un four à micro-ondes !
Très agréable cette balade avant le confinement. On s y croirait.
Merci Adrian
A.R. din Haïfa scrie :
Frumos scris si redactat.
Lumea e conştientā?
Nici decum.Crede in ce citeste in ziare si
vede la tele si aude la radio.
Si totul e manipulat.
Respect.
A.G. de Paris dit :
Cher Adrian
Je commence à attendre tes articles.
Bravo, tu m’as donné envie de visiter le Languedoc.
Amicalement
C.P. din Bucuresti comenteazà :
Oooof!
Noua “generație” de restricții pare cu atât mai insuportabilă cu cât contrazice mai frapant speranțele pe care le nutream : că, datorită vaccinării, combinate și cu numărul relativ mare al celor deja imunizați (cât de cât) direct prin boală, vom putea reîncepe să circulăm mai liber…
Nici la București nu stăm mai bine, iar dacă ne limitează din nou călătoriile în afara orașului, împiedicându-ne să ajungem la casa noastră de la munte (unde sperăm să pregătim și să petrecem Paștele, împreună cu “copiii” -fiul nostru cu logodnica)…etc.